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Le vrai nom de Shein et l’histoire de la marque de mode en ligne

2008 : Shein se cherche encore. À l’époque, la marque s’appelle SheInside, son nom complet s’affiche en toutes lettres et personne ne parie sur sa conquête mondiale. Sept ans plus tard, un virage. Le logo se raccourcit, la marque s’allège, l’ambition prend de l’ampleur. SheInside devient Shein, et la plateforme entame une expansion qui va bousculer l’ordre établi de la mode en ligne.

Shein : origines, nom véritable et ascension fulgurante

L’histoire de Shein commence dans les rues animées de Nankin, où Chris Xu lance la plateforme en 2008 sous l’égide de Shenzhen Global Egrow E-Commerce Co. Ltd. À ses débuts, SheInside vise principalement le marché chinois, mais dès 2015, le changement de nom annonce une nouvelle stratégie : viser l’international. Ce choix n’est pas anodin. Le nom se veut plus percutant, plus universel, prêt à séduire des clients aux quatre coins du monde.

À mesure que la marque s’implante à l’étranger, ses centres logistiques se multiplient entre Guangzhou, la Chine continentale et, depuis 2022, Singapour, désormais siège officiel. Ce déplacement d’ancrage symbolise l’ambition globale de Shein, qui ne cache plus ses objectifs de domination du secteur. En 2023, la barre des 30 milliards de dollars de chiffre d’affaires est franchie, hissant la marque aux côtés des titans du e-commerce mondial.

Le secret de cette ascension ? Une organisation redoutablement efficace : production à flux tendu, analyse automatisée des tendances, renouvellement constant des collections. Shein s’appuie sur une plateforme multilingue, une communication omniprésente, une logistique sans faille. Résultat : la marque s’impose comme le mastodonte chinois qui redéfinit la mode en ligne à grande échelle.

Comment la marque a bouleversé la fast fashion mondiale

Shein n’a pas simplement accéléré la cadence, elle l’a pulvérisée. Là où les enseignes comme Zara ou H&M proposaient quelques nouveautés par semaine, Shein inonde quotidiennement sa plateforme de milliers d’articles. Ce rythme inédit repose sur une chaîne de production entièrement pilotée par l’intelligence artificielle. Les données collectées via l’application, les réseaux sociaux et le site permettent d’anticiper les tendances et d’ajuster les stocks en temps réel.

Les prix, eux, sont imbattables. L’essentiel des collections repose sur des fibres synthétiques, principalement du polyester. Conséquence : un t-shirt à bas coût, livré en un temps record, que ce soit aux États-Unis, en France ou ailleurs. Même les nouveaux venus comme Temu ou Cider peinent à reproduire ce modèle ultra-rapide.

Une stratégie sociale implacable

Voici comment Shein s’y prend pour s’imposer sur les réseaux et fidéliser sa cible :

  • Présence omniprésente sur TikTok, Instagram, YouTube, Facebook
  • Multiplication des collaborations, que ce soit avec des micro-créateurs ou des influenceurs de renom
  • Utilisation fine des algorithmes, notifications ciblées, offres promotionnelles personnalisées

La marque brouille les frontières entre luxe, accessibilité et mode jetable. Femmes, hommes, enfants : chacun y trouve son compte. L’expérience d’achat devient quasi-ludique, addictive, au point de ringardiser les enseignes traditionnelles. Le secteur entier s’ajuste à cette nouvelle donne, tandis que Shein continue de dicter le tempo.

Groupe de jeunes achetant des vêtements en extérieur

Shein face aux critiques : enjeux sociaux, environnementaux et perception publique

Mais la machine Shein n’avance pas sans heurts. Les investigations se multiplient, dévoilant l’envers du décor. Des associations comme Public Eye Suisse mènent l’enquête dans les ateliers de fournisseurs à Guangzhou. Les constats sont accablants : heures de travail marathon, contrats précaires, conditions pointées du doigt. Les témoignages s’accumulent, alors que des voix politiques, à l’image de Bruno Le Maire en France, réclament des contrôles rigoureux sur la chaîne d’approvisionnement.

Côté environnement, le tableau s’assombrit encore. Greenpeace tire la sonnette d’alarme sur la généralisation des matières synthétiques et la présence de substances toxiques dans certains vêtements. Les analyses du laboratoire allemand ÖKO-TEST révèlent des traces de produits chimiques bien au-delà des normes européennes. La question du coton du Xinjiang refait surface, alimentant les débats autour du travail forcé et de la traçabilité des matières premières.

Perception publique et réactions en chaîne

Face à ces révélations, plusieurs mouvements émergent :

  • Des pétitions citoyennes dénoncent le greenwashing et les stratégies commerciales jugées trompeuses
  • Des associations comme The Good Goods, portée par Victoire Satto, alertent sur la pollution engendrée et les pratiques marketing opaques
  • L’Union européenne surveille de près les risques de violation du droit d’auteur et questionne le respect des droits humains

Shein se retrouve ainsi sous le feu des projecteurs, au cœur d’un débat mondial. Entre fascination pour des prix défiant toute concurrence et prise de conscience des conséquences éthiques et écologiques, le regard du public évolue. La mode en ligne, sous l’impulsion de ce géant chinois, ne sera plus jamais la même. Où s’arrêtera la course ?